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dernière mise à jour
22 mars 2013

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Capteurs de pression et de force

quatrième partie (4/6) : autres capteurs

capteurs capacitifs
une solution assez élégante
capteurs à variation d'inductance
pour des environnements sévères
capteurs piézoélectriques
une application des travaux de P. Curie
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Les capteurs à jauges de contrainte représentent l'essentiel du marché, mais d'autres principes sont aussi utilisés et parmi ceux-ci nous citerons ici les capteurs de type capacitif, ceux à variation d'inductance mutuelle et les capteurs piézoélectriques, et nous renverrons le lecteur au chapitre concernant les applications capteurs des fibres optiques pour avoir un aperçu de ceux-ci dans le domaine de la mesure des pressions.

capteurs capacitifs

Une solution élégante imaginée par certains constructeurs a été de transformer la déformation de la membrane sous l'effet d'une pression (ou d'une force) en une variation de capacité plutôt qu'une variation de résistance. En effet, il suffit de placer l'une des armatures d'un condensateur sur la membrane qui se déforme et l'autre sur une pièce solidaire du corps d'épreuve, mais non soumise à la déformation, comme le montre le schéma ci-dessous, pour réaliser un condensateur plan dont la capacité est en relation directe avec la pression appliquée.


Fig. principe du capteur capacitif absolu (a) ou différentiel (b)

Il est clair qu'on peut imaginer des géométries d'armatures permettant d'obtenir la meilleure linéarité possible entre variation de capacité et variation de pression, que l'on peut mettre en oeuvre simultanément plusieurs condensateurs et donc faire un montage en pont peu sensible aux contraintes thermiques. L'intérêt habituel du montage capacitif se retrouve évidemment dans cette application, à savoir qu'on intégrera généralement ce condensateur variable dans un circuit oscillant et qu'en conséquence la mesure de pression se ramènera à une mesure de fréquence. Et l'opportunité de disposer de deux oscillateurs semblables, l'un de fréquence fixe et l'autre variant avec la pression, dont on exploite via un mélangeur la différence des fréquences permet évidemment une très grande précision puisqu'on réduit ainsi par soustraction l'importance des dérives éventuelles de chaque oscillateur pris séparément.

La figure ci-dessous montre quelques présentations de capteurs capacitifs commercialisés


Fig. Quelques capteurs capacitif s (documentation Keller, CH-Winterthur)


capteurs à mutuelle inductance

Une autre possibilité a aussi été exploitée dans certains environnements sévères, c'est le capteur basé sur une variation d'inductance mutuelle. En effet il arrive que ni les jauges de contrainte ni les systèmes capacitifs ne donnent satisfaction, c'est par exemple le cas dans certains environnements radioactifs (neutrons) où les particules bombardant le capteur détruisent l'élément sensible très rapidement. On sait que les colles assurant la fixation des jauges de contraintes, mais aussi les alliages constitutifs de ces jauges ou les couches minces servant d'armatures au condensateur sont en effet très rapidement détériorées par les neutrons, et dans une moindre mesure par les rayonnements a et g de grande énergie. Dans ce cas l'emploi d'une structure inductive peut se révéler plus fiable et surtout présenter une durée de vie plus grande.
inductance

Fig. circuit magnétique typique

Considérons un circuit magnétique typique comportant un noyau demi-torique, entouré d'un bobinage de n spires parcouru par un courant i, et refermé par une pièce magnétique située à une distance d. Supposons que les deux matériaux magnétiques ont des perméabilités différentes. On sait qu'un tel circuit magnétique est le siège d'une force magnétomotrice dont l'expression est le produit du flux par la reluctance du circuit (par analogie avec la force électromotrice d'un circuit électrique parcouru par un courant i et possédant une résistance r). on montre aisément que l'inductance L est en relation avec la reluctance du circuit puisque le flux s'exprime par
Les reluctances en série s'ajoutent (comme les résistances) les indices concernent A l'armature mobile, C le demi-tore et G la lame d'air d'épaisseur d. Seule la lame d'air est susceptible de variation (puisque d peut varier) on peut donc ramener la reluctance totale à la somme d'un terme constant et d'un terme variant avec d, soit il en résulte immédiatement que l'expression de l'inductance varie avec d selon une relation que l'on peut écrire
capteur
On va exploiter cette idée dans divers capteurs comportant non un seul bobinage mais deux symétriques par rapport à la position de référence de l'armature mobile. Cette armature sera déplacée par l'action d'un piston, de géométrie plus ou moins complexe, solidaire de la membrane du capteur : ainsi chacune des inductances variant en sens inverse, en fonction de d+x pour l'une et d-x pour l'autre, on pourra obtenir, via une connection électrique adéquate, une ddp fonction du déplacement donc de la pression.


Fig. principe d'un capteur à inductance mutuelle.

Ces éléments sont réalisés avec des conducteurs massifs en cuivre donc évidemment beaucoup moins sensibles au rayonnement ce qui explique leur durée de vie sensiblement accrue. L'inductance mutuelle étant directement fonction de L1 et L2 est liée au déplacement relatif, il en résulte une variation d'impédance que l'on va ici encore exploiter dans un dispositif oscillant aussi bien que dans un simple montage en tension. La figure ci-dessous montre un exemple de réalisation pratique du coeur du capteur. La pièce mobile en bleu coulisse au coeur du noyau de la bobine de gauche et son déplacement est lié à une membrane non représentée sur la gauche. Notons que ce déplacement peut être provoqué par une pression mais aussi par une force ou même un déplacement quelconque d'une pièce. C'est donc une structure utilisable aussi bien comme capteur de dépacement, de force ou de pression.


Fig. transducteur à inductance mutuelle.

Ici les deux bobinages sont montés en série et traversés par le même courant, mais au niveau du mesureur de tension on récupère évidemment une ddp différente de zéro dès lors que la pièce mobile n'est plus dans sa position de référence.


capteurs piézoélectriques

Avertissement : tout d'abord une petite remarque, il ne faut pas confondre piézorésistance et piézoélectricité. Tout matériau métallique ou semi métallique est piézorésistif, c'est à dire que sa résistivité varie lorsqu'il est soumis à une contrainte mécanique qui induit un rapprochement ou un écartement des atomes constitutifs du matériau. Au repos la répartition des atomes constitutifs d'un métal polycristallin est statistiquement (c'est à dire macroscopiquement) régulière ce qui induit que la majeure partie de ses propriétés physiques sont isotropes et que la répartition des charges électriques positives équilibre pratiquement en tout point celle des charges négatives chaque atome constitutif étant électriquement neutre: le matériau est globalement et localement neutre.

Dans un matériau piézoélectrique de type monocristallin l'équilibre électrostatique provient du fait qu'il y a , au repos, une répartition régulière des charges négatives liées à des ions négatifs (ions dont la position est figée structurellement) généralement des atomes d'oxygène chargés deux fois moins (donc ayant complété leur dernière couche électronique à 8 électrons) et des ions positifs (eux aussi figés) de type atome métallique chargés plus (c'est à dire ayant au contraire perdu leurs électrons les plus périphériques au profit des atomes d'oxygène. Il s'agit donc d'un tout autre type de matériau s'apparentant à un diélectrique particulier et ce matériau n'est plus localement neutre et une contrainte va induire non une variation de résistivité mais une variation de la position des ions dont il résultera un déséquilibre électrostatique. Notons qu'en raison du positionnement régulier des ions dans le monocristal celui-ci est d'une grande stabilité mais aussi d'une grande rigidité : à contrainte égale un matériau piézoélectrique va donc voir ses dimensions varier beaucoup moins qu'un matériau piézorésistif. On ne pourra donc pas espérer exploiter une variation de résistivité d'un matériau piézoélectrique mais seulement une ddp induite par le déséquilibre géométrique des charges. Nous illustrons ceci plus en détail ci-dessous.
la piézoélectricité
La piézoélectricité découverte par Jacques et Pierre Curie en 1880 désigne la propriété qu'ont certains matériaux de développer une charge électrique proportionnelle à la contrainte qui leur est appliquée, et inversement de se déformer en fonction du champ électrique . Ce phénomène a donné lieu à diverses applications selon que l'on privilégie l'effet direct ou l'effet inverse. L'application d'un champ électrique variable induit une déformation variable et c'est typiquement l'application exploitée dans les oscillateurs à quartz. Ici c'est l'effet direct qui nous intéresse, c'est à dire la génération d'une ddp entre les deux faces d'une lame pièzoélectrique soumise à une contrainte.

Pourquoi certains matériaux sont ils piézoélectriques? La réponse est immédiate si l'on examine leur structure cristalline. Il s'agit toujours de matériaux dont les cristaux ne sont pas positionnés aléatoirement mais au contraire orientés (en raison du processus de fabrication du matériau) et en outre ces cristaux ont une structure particulière. Nous allons illustrer cette caractéristique dans le cas du quartz (qui est une variété cristalline de silice) en examinant un modèle géométrique simplifié de la structure de ce cristal. Ce modèle pour des raisons pédagogiques est bidimensionnel alors que dans la réalité le cristal de quartz est tridimensionnel, mais la représentation en serait malaisée.


Fig. modèle structural de la silice

La structure de base de la silice peut-être schématisée par un modèle hexagonal (a). Les atomes de silicium sont chargés positivement tandis que les atomes d'oxygène sont chargés négativement. En réalité le système est tridimensionnel (pyramidal) et chaque atome de silicium est lié à 2 autres atomes d'oxygène, symétriques par rapport au plan de la figure, de telle sorte que tous les angles soient de 120°. Dans ce cas, le barycentre des charges positives et celui des charges négatives sont confondus (dans le modèle pédagogique bidimensionnel le triangle reliant les atomes de silicium est équilatéral de même que celui reliant les atomes d'oxygène et ils ont même barycentre).

Par contre si l'on exerce une pression sur le matériau (figure b) on voit alors que l'hexagone n'est plus régulier et en conséquence les barycentres des charges positives et négatives ne sont plus confondus. C'est vrai pour l'ensemble de l'échantillon et il en résulte l'apparition d'une charge négative sur la face supérieure et positive sur la face inférieure (dans le cas illustré ici) c'est à dire d'une ddp dont l'amplitude est effectivement représentative de l'amplitude de la contrainte. L'exploitation directe de cette ddp va permettre la réalisation de capteurs de pression intéressants.

Les matériaux piézoélectriques
  • Le quartz est le plus connu, mais il n'est pas utilisé en pratique en capteur piézoélectrique de force ou de pression.
  • On lui préfère certains matériaux céramiques ferroélectriques tels le titanate de baryum (BaTiO3), le titanate zirconate de plomb (PZT) le titanate zirconate de lanthane et de plomb (PLZT) qui génèrent des ddp plus importantes,
  • de même que certains polymères ou composites tel le fluorure de polyvinylidène (PVDF). Les polymères ont des propriétés piézo moins importantes que les céramiques, mais ils présentent l'avantage de pouvoir être réalisés en films de grande surface donc d'être destinés à certains types d'applications d'analyse des contraintes plutôt que de capteur de pression classique, ou d'hydrophones (microphone en milieu aqueux).
  • On a aussi récemment réalisé des matériaux composites céramiques-polymères qui associent les hautes performances des céramiques et la souplesse de mise en forme des polymères ainsi qu'une impédance réduite.
caractéristiques d'une lame piézoélectrique
Le schéma équivalent d'une lame piézo étant figuré ci-dessous montre une réactance évoluant fortement autour de la fréquence dite de résonance (exploitée pour les oscillateurs) et une réactance plus constante vers les plus hautes fréquences (exploitée dans les capteurs)


Fig. schéma équivalent à une lame piézoélectrique et variation de sa réactance en fonction de la fréquence au voisinage de la résonance

Notons en outre que les céramiques piézoélectriques ont un module d'Young très élevé, aussi pour obtenir un signal important il faut leur appliquer des contraintes très élevées, on va donc les utiliser préférentiellement dans ces cas et donc les réserver soit aux capteurs pour très grande pression, soit plutôt aux capteurs de force industriels (pesage de charges de plusieurs tonnes).
capteur
La figure ci-dessous montre le principe de base d'un capteur de pression réalisé à l'aide d'un diaphragme piézoélectrique utilisé typiquement comme microphone (c'est à dire capteur de pression acoustique). On a disposé en pratique de deux films piézo inverses, séparés par un diaphragme métallique, ce qui accroît la sensibilité puisque l'un des éléments sera comprimé et l'autre au contraire en extension.


Fig. microphone piézoélectrique

Dans un tel capteur de pression la tension récupérée s'exprime par relation dans laquelle d31 est la composante du coefficient de piézoélectricité dans la direction 31 (eu égard à l'orientation du film par rapport aux axes cristallographiques), la constante diélectrique du film, D le diamètre utile du capteur, h l'épaisseur du film et son coefficient de Poisson.


ex de capteur piézoélectrique hermétiquement soudé (doc.DJB)

En raison de la haute impédance des matériaux piézoélectriques, leur emploi comme capteurs implique la proximité de l'amplificateur, dont l'impédance d'entrée doit évidemment être très grande, afin de limiter l'influence des câbles de liaison. La tendance est d'ailleurs de plus en plus à l'intégration de l'électronique dans le boitier capteur comme on le voit sur la photo ci-dessous. Notons que cette obligation de proximité induit un effet pervers. En effet l'effet piézoélectrique est peu sensible à la température et de ce fait une jauge piézoélectrique peut être a priori utilisée jusqu'à des températures relativement élevées puisque les céramiques utilisées ont généralement une stabilité chimique jusqu'à des températures très élevées (souvent bien au delà de 1000°C). Cependant la présence de l'électronique, du fait de la limitation du silicium à 200°C environ, à proximité immédiate de la membrane réduit quasi à néant cet avantage des capteurs piézoélectriques.


Fig. exemple de coupe d'un capteur de pression commercialisé (Althen Sensortechnik, D-Kelkheim)
Conclusion
Il existe de nombreux moyens de mesurer une pression. La plupart d'entre eux sont d'ailleurs des procédés généralistes susceptibles de mesurer des déplacements, des forces et/ou des contraintes et parfois même des niveaux ou des débits. Le choix d'un procédé plutôt qu'un autre dépendra essentiellement de la plage de pression à mesurer, des contraintes thermiques et des conditions environnementales du problème. Nous rappelons que quelques autres techniques et technologies figurent dans le chapitre 53 (technologies silicium et fibres optiques).


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