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version initiale 2002
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dernière mise à jour
22 mars 2013

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LES TENDANCES TECHNOLOGIQUES

huitième partie (8/8): mems et microactionneurs

mems et applications
le facteur du développement
micromoteurs
historique
comment on les fabrique
deux procédés
micro-manipulateurs
le nanomonde
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Préambule
Il peut sembler aberrant dans un cours consacré aux capteurs de parler des actionneurs, mais comme on l'a vu le développement technologique conduit naturellement à ce qu'on appelle des MEMS (mechanical and electronical microsystems) et sous ce vocable on rencontre à la fois des microcapteurs et des microactionneurs parfois d'ailleurs associés dans le même bloc de silicium. Le développement de tels dispositifs est d'ailleurs l'une des tendances lourdes du développement de la microélectronique vers ce qu'on appelle les nanotechnologies et qui regroupe microélectronique et micromécanique (ou mécatronique) sous le sigle anglo-saxon MEMS.

Précisons qu'indépendamment de l'aspect miniaturisation d'un dispositif mécanique, la technologie MEMS est aussi un nouveau paradigme de réalisation de systèmes mécaniques inimaginables auparavant ce qui se traduit par un marché en pleine croissance (plus de 20% par an) dont le chiffre d'affaires, en 2002, devait avoisiner les 30 Mds d'Euros. Eu égard au fantastique essor potentiel de ces technologies dans les prochaines années, dont tous les experts prédisent qu'elles vont révolutionner notre existence de manière plus importante que ne l'a fait jusqu'alors l'informatique, il nous a donc semblé indispensable de consacrer un chapitre aux micro-actionneurs.
mems et domaines d'application
Au risque de sembler nous répéter, ici encore nous ne serons exhaustif. En effet il ne s'écoule pas une semaine sans qu'une nouvelle application des technologies mems ne soit dévoilée et une fois encore ce chapitre sera obsolète avant même d'être publié. Les dispositifs micro-opto-électromécaniques concernent tous les domaines où les dimensions, les mouvements à contrôler sont à l'échelle du micron, c'est à dire en pratique inférieurs au millimètre avec donc une résolution qui peut être inférieure au micron et, comme on va le voir dans la suite ça concerne à peu près tous les domaines. Citons, dans le désordre: Dans chacun de ces domaines les MEMS vont transformer les manières d'agir grâce, d'une part, aux innovations qu'elles apportent et, d'autre part, au coût généralement modeste de ces innovations produites en très grande série, en particulier certaines applications de type mono utilisation jetable dont les coûts sont de l'ordre de 1€.


micromoteurs
Historiquement le micromoteur a été le premier microsystème avec une pièce en mouvement à susciter l'intérêt des chercheurs. De très nombreuses applications de ces micromachines font aujourd'hui appel à des micromoteurs, c'est à dire des moteurs de très faible dimension susceptibles d'entrainer des dispositifs eux-mêmes de très faible puissance, on parle alors en milliwatts.
moteurs annulaires
La technologie mise en oeuvre pour la gravure 3D du silicium, présentée au chap51, peut effectivement être employée à la réalisation de bien d'autres dispositifs micro-actionneurs, tels le micromoteur figuré ci-dessous dont le rotor a un diamètre de 120µm et une épaisseur de 7µm pour une vitesse de rotation pouvant atteindre 10000 tr/mn.


micromoteur électrostatique (Hirano et al. 1993 Japan)

A quoi peut servir un tel micromoteur ? En dehors de la performance technologique, de tels micro-actionneurs ont un débouché naturel en microchirurgie pour la réalisation de microforeuses destinées à aller déboucher une artère obstruée par une plaque d'athérome. Ils ont aussi des applications en neurochirurgie, mais aussi dans bien d'autres domaines.

autre vue d'une partie d'un micromoteur développé aux USA micromoteur développé au LMA de l'université de Besançon

Au sein de l'équipe LMA de l'université de Besançon l'accent est mis sur la microrobotique ce qui implique, entre autres, le développement de micromoteurs électrostatiques fonctionnant à diverses fréquences (entre quelques Hz et quelques dizaines de kHz). Le moteur figuré ci-dessus fait 500µm et appartient à une platine sur laquelle 4 moteurs différents ont été intégrés afin d'étudier les interactions et les problèmes liés à la commande de microactionneurs. Notons que ces moteurs ont des vitesses de rotation comprises entre 0.001 et 750 tr/mn avec des puissances mécaniques de l'ordre de 10µW, ce qui est sensiblement un million de fois la puissance mécanique obtenue pour les premiers micromoteurs américains de taille voisine en 1988! Un tel micromoteur de 500µm pourrait aisément piloter une montre à aiguilles traditionnelles.
moteurs tubulaires
Le moteur plan ci-dessus est limité en raison justement de sa structure plane de très faible épaisseur. Mais récemment cette limitation a été transformée en avantage dans la réalisation d'un moteur tubulaire à l'échelle millimétrique. L'idée, exploitée à Besançon, est de réaliser les dispositifs électrostatiques responsables de la rotation du rotor sous forme de dépôt flexible de silicium sur le stator en exploitant l'espace libre qui est traditionnellement présent entre un rotor et un stator en raison des tolérances d'usinage. Il est ainsi possible de caser dans cet espace des milliers de microactionneurs électrostatiques.


moteur tubulaire (LMA Besançon)

Sur la photo ci-dessus on distingue très nettement la couche de microactionneurs en silicium dans la partie émergente du cylindre intérieur. Dans une surface de 2x3 mm2 on a 1340 actionneurs, ce qui pour un moteur de 1.1mm de diamètre et 2mm de long conduit à un couple de 100000µN


Comment réalise-t-on un tel dispositif?
procédé classique
En première approximation on peut dire que l'on utilise les procédés développés pour la fabrication des composants électronique (cf chap ad hoc), mais en pratique plusieurs procédés de fabrication vont être exploités concurremment. En effet, l'une des différences essentielles entre les MEMS et les composants électroniques tient au fait que les premiers doivent posséder des propriétés mécaniques contrôlées. Ce qui revient à dire qu'il va être indispensable dans les MEMS d'éliminer les contraintes et tensions résiduelles dans les films de polysilicium qui constituent le plus souvent l'élément sensible dont le microdéplacement sera contrôlé ou significatif (selon qu'il s'agit d'un actionneur ou d'un microcapteur tel un accéléromètre ou un capteur de pression/force).

Ainsi après dépôt d'un tel film, et avant de réaliser l'électronique du dispositif qui elle sera réalisée plus classiquement, on devra procéder à un recuit post-déposition à haute température. Ensuite les dopages sélectifs et les attaques chimiques à l'acide fluorhydrique n'introduiront pas de contraintes parasites et ne modifieront donc pas les propriétés mécaniques du dispositif. On peut d'ailleurs aussi parfaitement contrôler les contraintes dans un film de Si3N4 en jouant sur la température de dépôt et l'épaisseur relative d'un dépôt de SiO2 sur le Si3N4 (on peut ainsi obtenir des films sans contrainte ou avec contrainte positive ou négative selon le besoin).

Notons que Si3N4 va être utilisé pour définir les zones à protéger de la gravure (tant en ce qui concerne la microstructure mécanique que les éléments de circuits électroniques, tandis que SiO2 sera essentiellement utilisé comme couche sacrificielle, c'est à dire comme substrat temporaire qui sera totalement éliminé en fin de fabrication de la structure mécanique pour réaliser les espaces vides. En effet le SiO2 ne peut facilement être obtenu exempt de tensions et ne doit donc pas participer au dispositif mécanique final, à la différence de Si3N4 qui pourra lui jouer un rôle d'isolant électrique dans une zone, à propriétés mécaniques voulues, soumise à d'éventuelles variations de contraintes. Par contre, dans une zone neutre vis à vis des propriétés mécaniques du dispositif, le SiO2 pourra être éventuellement conservé en tant qu'isolant.

Pour la sculpture en volume du silicium, le procédé de gravure exploite le plus souvent l'EDP (éthylène diamine et pyrocatéchol) ou la potasse (KOH) et l'hydrazine (N2H4) qui n'attaquent pas la silice ou le nitrure de silicium. On peut aussi utiliser des masques constitués de films d'or ou de chrome pour protéger les zones à ne pas graver.
le procédé LIGA
Le second procédé de fabrication, développé à Karlsruhe (Allemagne) sous le nom de LIGA (LIthographie, Galvanoformung und Abformung), est donc basé sur l'électrodéposition et le moulage. Ce procédé adopté, maintenant, par la majorité des équipes européennes, présente un énorme avantage car il peut être exploité non seulement avec le silicium mais aussi et surtout avec nombre de matériaux pour réaliser des microstructures 3D tels des métaux, des céramiques, mais aussi des verres et des polymères ce qui élargit considérablement le champ d'application des MEMS. Dans ce procédé le matériau constitutif de la microstructure va être déposé uniquement sur les zones où elle sera bâtie. Ensuite le moule est dissous chimiquement. Des polyimides photosensibles sont utilisés pour la réalisation des moules selon un procédé photolithographique classique (mais inversé puisque le polyimide joue le rôle d'un photoresist négatif).

micro manipulateurs
micropréhenseur
En microrobotique, en particulier pour les applications médicales, on a besoin de micro-manipulateurs. La figure ci-dessous donne un exemple d'un tel dispositif. Ce composant de préhension permet la manipulation, c'est-à-dire la saisie, le maintien, le positionnement, l’orientation et le lâcher, d'objets 3D de dimensions micrométriques, de quelques microns à plusieurs centaines de microns. Ce micropréhenseur est développé dans l’optique «Microrobot On chip», permettant son utilisation aisée dans une cellule microrobotique.

Notons quelques caractéristiques : la distance initiale entre doigts est de 250µm et l'épaisseur de cette pince est de 200µm. En outre différentes formes d'extrémité de la pince sont possibles

micropince (photo LAB Besançon) diverses formes de pinces
pousseur
Mais d'autres pistes sont exploitées, en particulier pour des analyses cellulaires en milieu liquide il est intéressant de pouvoir déplacer une cellule pour l'amener en position centrale sous l'objectif du microscope. Il s'agit d'un déplacement micronique. Comment procéder? L'idée a été de développer des micro-actionneurs, on parle de micro-pousseurs en matériau magnétique qui pourront aisément être déplacés via un champ magnétique et "pousser" la cellule. La photo montre le principe d'action et quelques formes de micro-actionneur ferromagnétique.


doc LAB Besançon

La photo de gauche montre le principe : le pousseur est posé sur la plaque de verre sur laquelle on va devoir déplacer les cellules à examiner (ou n'importe quel dispositif non magnétique de dimension micrométrique. Un aimant pilotable en x et y est sous la lame de verre et définit la position du pousseur ferromagnétique.
smart surface
. La miniaturisation toujours plus grande des composants électronique va obligatoirement aboutir à des objets trop petits pour pouvoir être manipulés manuellement par un humain. Il est donc indispensable de développer des outils permettant cette manipulation. Un autre procédé pour réaliser des microdéplacements consiste à utiliser une surface déformable constituée de milliers de surfaces élémentaires dont on peut assurer séparément la déformation. Il est ainsi possible d'obtenir un microdéplacement d'un micro-objet. Actuellement on sait réaliser des surfaces tactiles disposant de plus de 1000 micro-actionneurs électrostatiques au mm2 et susceptibles de convoyer intelligemment une pièce de surface micrométrique.


smart surface (noter les rangées de micro-actionneurs)

Notons qu'en intégrant le long de ce réseau distribué d'actionneurs un ensemble de microcapteurs de force (le tout en silicium) il est possible d'obtenir une information tactile sur la forme exacte et la position de la pièce à déplacer et donc de piloter au mieux les actionneurs.


vue de dessus et en coupe d'un microactionneur

Comment ça marche? L'idée est simple. On sait réaliser des micro-accéléromètres par micro-usinage du silicium, c'est à dire une surface ayant la possibilité de "pivoter" légèrement autour d'un de ses cotés. C'est la même idée pour le micro-actionneur, mais on applique une charge électrique de même signe sur la surface mobile A et la surface inférieure fixe B il en résulte une force de répulsion ayant tendance à faire pivoter vers le haut la surface A. On comprend aisément que si l'on agit ainsi simultanément sur plusieurs actionneurs contigus on va pouvoir bouger un mobile reposant sur cet ensemble. En jouant sur l'orientation des divers microactionneurs et en appliquant non une ddp constante mais périodique et en déplaçant celle-ci on va provoquer une micro-vibration susceptible d'assurer la translation de la pièce.