généralités
ce chapitre n'est pas un cours sur les fibres optiques mais simplement une introduction
destinée à familiariser le lecteur avec les principales propriétés
des fibres optiques en vue de comprendre comment on peut les employer dans des
capteurs. Pour une approche plus spécifiquement télécoms
nous renvoyons le lecteur vers des cours beaucoup plus adaptés cités
en bibliographie.
Une fibre optique est un guide d'onde optique constitué de deux ou plusieurs
couches de matériaux diélectriques transparents (verre ou plastique) d'indices
de réfraction différents assurant le confinement de la lumière au voisinage
du centre.
Du fait de la symétrie circulaire de la fibre optique, on utilise un
système de coordonnées cylindriques où z est l'axe de la fibre et les coordonnées
r et
sont dans le plan de
section droite de la fibre.
fabrication
En pratique divers profils d'indice sont utilisés selon le type d'application.
La figure ci-dessous donne quelques exemples. Le plus employé est le
profil à saut d'indice dans lequel la fibre est constituée de
deux zones concentriques homogènes avec un saut brutal d'indice à
l'interface, la zone centrale est le coeur et la couche périphérique
est appelée gaine optique. Le plus souvent une enveloppe protectrice
assure une protection à la fois mécanique et surtout optique vis
à vis de la lumière extérieure.
Dans une fibre optique la lumière est confinée dans la zone centrale
et guidée grâce à la gaine optique. Le plus souvent le coeur
est en silice ou en verre spécial tandis que la gaine de protection est
plus généralement en plastique. Pour obtenir des indices de réfraction
différents entre les deux couches on procédera le plus souvent
à un dopage. Notons que ces indices diffèrent seulement de quelques
millièmes.
Nous présentons ci-dessous quelques procédés classiques
de fabrication:
On peut les classer en deux groupes
- les méthodes dites internes qui consistent à déposer
à l'intérieur d'un tube de silice un matériau vitreux
et à rétreindre cette structure pour obtenir un barreau. Citons:
- MCVD modified chemical vapor deposition
- PMCVD plasma MCVD
- SPCVD surface plasma CVD
- les méthodes externes (outside vapor deposition)
ou le matériau est déposé sur un mandrin en rotation
par un procédé d'hydrolyse à la flamme. Le rétreint
est effectué après retrait du mandrin en même temps
que la vitrification du matériau.
- HALF hydrolyse à la flamme
- VAD vapor axial deposition
- ALPD axial lateral plasma deposition
Ensuite la préforme est étirée par gravité, sous
température et en atmosphère contrôlée (afin d'obtenir
une viscosité précise du matériau qui coule). L'étirage
est alors complété par une action mécanique. La fibre est
ensuite entourée d'un revêtement plastique constitué d'une
résine polymérisable dont on contrôle aussi la qualité
car elle doit être imperméable, stable dans le temps, ne pas provoquer
de microcourbures, adhérer à la fibre et être cependant
facile à enlever pour les opérations de connexion.
Les fibres plastiques qui sont des polymères styréniques ou méthylméthacryliques
(PMMA) sont obtenues par des procédés classiques en chimie organique
puis extrudée ou étirées à partir d'une préforme
transmission
La dimension du coeur joue un rôle très important : en effet s'il
est de quelque microns la lumière va s'y propager selon un seul mode,
on parle alors de fibre unimodale; si par contre il est de l'ordre de plusieurs
dizaines de microns on parlera de fibre multimodale dans laquelle la propagation
de la lumière sera plus complexe avec des phénomènes de
dispersion plus importants. C'est pourquoi la fibre unimodale est préférée
en télécommunications à longue distance.
Pour mettre en équation le processus de guidage on utilisera la théorie
de la propagation géométrique valable pour des coeurs de grande
dimension (vis à vis de la longueur d'onde de la lumière considérée),
mais aussi la théorie ondulatoire et les équations de Maxwell
plus appropriées pour les faibles diamètres de coeur.
Considérons dans un premier temps une approche géométrique
Le choix d'un profil à saut d'indice, tel celui figuré ci-dessus,
entraine les conséquences suivantes:
pour qu'un rayon soit effectivement guidé dans la fibre il faut
que sa direction à l'entrée se situe dans un cône
dit d'acceptance
un rayon guidé va subir une réflexion
totale à l'interface des deux couches optiques.
un rayon hors du cône d'acceptance sera simplement réfracté
à l'entrée dans la fibre puis à l'interface des deux
couches, il passera alors dans la gaine et sera perdu.
l'angle d'acceptance permet de définir ce qu'on appelle l'ouverture
numérique de la fibre, ouverture qui dépend bien évidemment
des indices respectifs des deux couches optiques.
pour exploiter une fibre optique il faut donc faire converger la lumière
à l'entrée à l'intérieur du cône avec
une image qui soit inférieure au diamètre du coeur ce qui
est relativement aisé à obtenir avec une source laser mais
bien plus difficile avec une source classique.
Si l'on examine les rayons lumineux en fonction de leur direction d'entrée
dans la fibre on va constater que certains vont avoir une trajectoire "hélicoïdale"
c'est à dire ne coupant jamais l'axe de la fibre, tandis que d'autres
au contraire seront de type "méridionaux" ce qu'illustre la
figure ci-dessous représentant une projection en coupe des trajectoires
dans le coeur de la fibre.
Les fibres sont des guides d'ondes lumineuses qui, confinant celles-ci dans
une cavité résonante, voient apparaitre des modes résonants
stationnaires. La propagation est ainsi monomode ou multimode selon les caractéristiques
de la fibre.
Comme nous considérons le cas le plus courant d'une fibre à saut
d'indice, l'approche ondulatoire destinée à expliciter les modes
sera relativement simplifiée. La fibre est un guide d'onde caractérisé
par son profil d'indice n(r) invariant le long de l'axe de propagation z.
L'expression du champ électromagnétique obéit aux équations
de Maxwell

où

est la fréquence et

la constante de propagation du mode considéré
mais dans ce cas on peut négliger les composantes longitudinales du champ
électromagnétique et le système devient scalaire.
La constante de propagation
est liée à la vitesse de phase Vp par
et l'on peut définir un indice effectif du mode neff=
/k
qui dans une fibre à saut d'indice va avoir une valeur intermédiaire
entre les deux indices des deux couches, mais évidemment spécifique
du mode. Notons que l'énergie lumineuse transportée est la somme
de celle transportée par chaque mode dans le cas d'une fibre multimodale.
Mais en pratique il faut prendre en compte la réalité de l'atténuation.
fibres multimodes à gradient d'indice
Les fibres à gradient d'indice ont été spécialement
conçues pour les télécommunications. Leur coeur n'est plus
homogène, l'indice de réfraction décroit depuis l'axe jusqu'à
l'interface suivant la loi :
avec r distance à l'axe,
= n1-n2<<n1,
exposant de profil d'indice voisin de 2
L'atténuation
Dans une fibre optique réelle on constate que toute l'énergie
lumineuse entrante n'est pas récupérée en sortie. Il y
a des phénomènes de dispersion, causes
de cette perte (ou atténuation) qui, dans une fibre de télécommunication,
pour une longueur d'onde optimale de 1550nm, atteint environ 0.17dB/km contre
2.5dB/km à 850nm et 0.3dB/km pour 1300nm.
fig. courbe d'atténuation d'une fibre QSF A 200 (doc. Quartz et
Silice)
Les causes des pertes dans les fibres sont multiples. On distingue généralement
:
l'absorption par les impuretés: En effet
une fibre de silice, quoique très purifiée, n'est pas parfaite
et les atomes d'impuretés vont avoir plusieurs effets perturbateurs
dont l'absorption purement et simplement du photon par un électron
de l'atome, avec transformation finale de l'énergie lumineuse du
photon en chaleur
la diffusion par les impuretés ou par les
défauts d'interface coeur-gaine et la diffusion Rayleigh qui est la diffusion
de la lumière sur les molécules du matériau (la silice), due à des
variations locales de l'indice de réfraction créées
par des changements de densité ou de composition apparus au moment
de la solidification du matériau
la dispersion chromatique due aux vitesses différentes de signaux
lumineux de longueurs d'onde différentes
la dispersion intermodale résultant des temps de propagation différents
selon les modes
les courbures et les micro-courbures de
la fibre, la fibre ne peut pas dans une application réelle être,
sauf exeption, exempte de courbures et dans ces zones le risque pour un
rayon lumineux de ne plus satisfaire la condition de réflexion totale
est inévitable ce qui se traduit par une perte dans la gaine par
simple réfraction.
la diffusion et la réflexion aux épissures,

Nous nous intéresserons plus particulièrement à ce problème
de connectique. C'est actuellement l'une des sources les plus importantes des
pertes d'une ligne de fibre optique unimodale. En effet lors d'une connexion
bout à bout on peut avoir :
- une séparation longitudinale ,
- un désalignement radial ,
- un désalignement angulaire ,
- une excentricité des coeurs ,
- voire une ellipticité des coeurs.
La connexion entre deux fibres semblables s'effectue de deux manières
: Dans une première technique on réalise une épissure à
l'aide d'une machine spécialisée (une épisseuse) réalisant
une véritable soudure entre les deux fibres mises bout à bout
par fusion au microchalumeau ou plus fréquemment à l'aide d'un
arc électrique. Le positionnement relatif des deux fibres est réalisé
grâce à des micromanipulateurs et contrôlé optiquement.
Typiquement en envoyant un faisceau intense dans l'une des fibres et en mesurant
la quantité de lumière transmise dans l'autre. Le positionnement
idéal coincide évidemment avec une maximum de lumière transmise.
Notons que réaliser une épissure en laboratoire est relativement
aisé, mais le gros problème est de réaliser une épissure
sur site. Pour résoudre ce problème de nombreux constructeurs
ont réalisé de véritables connecteurs tels ceux figurés
ci-dessous.
couplage
L'un des dispositifs clés en télécommunication optique
est le coupleur, c'est à dire le dispositif qui va permettre la transmission
d'un signal d'une fibre à une autre.
Il est réalisé le plus souvent par mise en parallèle de
deux fibres identiques puis fusion tangentielle et étirage à chaud.
On obtient alors dans chaque fibre une structure conique telle celle figurée
ci dessous
Le comportement du coupleur va dépendre essentiellement de la conicité
de la zone étirée. On imagine aisément que la condition
de réflexion totale va être singulièrement modifiée
dans cette zone et donc que des rayons lumineux vont pouvoir passer dans la
gaine optique commune aux deux fibres accolées par fusion et de cette
gaine optique dans la seconde fibre. Le processus est complexe car la fibre
unimodale à saut d'indice se transforme dans cette zone conique en une
fibre multimodale. En pratique le process de fabrication d'un coupleur va être
lui aussi supervisé en contrôlant la puissance transmise d'une
fibre à l'autre et l'allongement sera interrompu dès qu'on aura
obtenu le résultat escompté lequel dépend de l'application
envisagée (100%, 50/50 voire parfois 90/10). Le type de verre de silice
(différemment dopé) joue évidemment aussi un rôle
important dans le résultat.
La figure ci-dessous donne un exemple de réalisation industrielle de
commutateur optique.
L'une des applications de l'étirement d'une fibre est le problème
de la connexion entre l'extrémité d'une fibre et la source laser.
Typiquement les composants optroniques (diodes laser) ont effectivement des
dimensions de l'ordre du micron tandis que la fibre optique est beaucoup plus
grande en diamètre, aussi étirer l'extrémité d'une
fibre afin d'optimiser le fonctionnement de la liaison diode laser-fibre optique
est un des moyens envisagés pour obtenir des possibilités d'emploi
des fibres optiques dans le domaine des très hautes vitesses de transmission
(en dizaines de gigabits/s/km) car il est alors possible d'exploiter pleinement
l'émission laser sur la tranche de la diode.
fibres optiques pour capteurs
Les fibres pour télécommunications sont parfois utilisées
pour des réalisations de capteurs à fibres optiques en raison
de leur disponibililté et de leur faible coût. En revanche elles
sont souvent mal adaptées à ce domaine qui demande des caractéristiques
spécifiques et dans ce cas on adopte parfois des compromis conduisant
à une efficacité réduite. C'est pourquoi on a développé
des technologies afin d'obtenir des fibres conservant leurs propriétés
de polarisation circulaire de la lumière sur toute leur longueur.
Ces fibres sont de trois types:
- les fibres à faible biréfringence, quasi-abandonnées
à cause des difficultés extrèmes de fabrication.
- les fibres à forte biréfringence linéaire, dont
les plus utilisées sont celles dénommées "BOW
TIE" (noeud papillon) et "PANDA".
- les fibres spéciales capteurs conçues en fonction de critères
particuliers.
P. Nicole, interconnexions
électriques et optiques pour matériels aéronautiques,
L'onde Electrique, (1990), Vol 70, (6) p32.
Y Suematsu, K-I Iga, Transmission sur fibres optiques, Masson ed, (Paris),
S. Ungar, fibres optiques: théorie et applications, Dunod (Paris)
A. Cozannet & al., Optique et télécommunications,
Eyrolles (Paris),
S.
Lacroix, cours
sur les fibres optiques, Polytechnique (Montréal). le cours le
plus complet sur le web.
consultez aussi notre
rubrique de liens tous sans exception vous apporteront bien plus que vous
ne l'imaginez